Comment réduire l’usage des médicaments en élevage ?

Cochons

Des animaux élevés dans des conditions confortables et une grande attention quotidienne de l’éleveur sont la clé pour avoir des animaux en forme et utiliser moins de médicaments.

Sébastien Brishoual

Pour avoir des porcs en bonne santé, Sébastien Brishoual, éleveur de porcs à Tréméven (29) et son équipe de 3 salariés, mettent leurs 320 truies et leurs petits à l’abri des contaminations extérieures. « Avant de franchir la porte, c’est douche et changement de tenue obligatoires pour tous. Même pour nous qui sommes au quotidien dans l’élevage. »

Y a-t-il des alternatives aux antibiotiques ?

Dans son environnement protégé des contaminations extérieures, l’animal démarre du bon pied. Et tout commence à la naissance. Nous sommes très attentifs à ce que les porcelets consomment bien le colostrum de sa mère qui est riche. Ce premier lait protège le nouveau-né pendant ses premières semaines de vie, le temps qu’il acquiert sa propre immunité. Nous distribuons également de l’argile aux porcelets. Je remarque qu’ils aiment farfouiller là-dedans. Cette argile adoucit le tube digestif des jeunes animaux. Par ailleurs, c’est une façon pour le petit cochon d’exercer son instinct naturel de fouissage. Nous leur donnons également une pâte à base d’algues et de glucose pour leur donner du tonus. La vaccination des truies avant la mise-bas participe aussi à renforcer la protection des nouveau-nés et à les prémunir des diarrhées néonatales. Au besoin, j’ai aussi un système capable de diffuser des huiles essentielles en maternité. Quand les porcelets sont sevrés, j’en incorpore également lorsqu’ils toussotent.

Ce premier lait protège le porcelet pendant ses premières semaines de vie.

Du porc sans antibiotique, c’est possible ?

Au sevrage, les porcelets intègrent des salles propres et chaudes. Pour une rentrée en bâtiment post-sevrage le jeudi, le chauffage est mis en route dès le mardi. Pour éviter la concurrence entre les animaux, nous constituons des lots homogènes en évitant le mélange de porcelets de 1re portée plus fragiles avec des porcelets de 2e portée plus costauds. Dans cette période délicate qu’est le péri-sevrage, j’utilise un acidifiant alimentaire (un peu comme du jus de citron) pour sécuriser le milieu digestif. Nous fonctionnons avec un aliment 1er âge blanc, c’està-dire sans antibiotique. Nous sommes capables de garantir du porc sans antibiotique sur toute la période d’élevage.

L’alimentation peut-elle participer au processus de réduction des médicaments ?

Le 2e jour après sevrage, quand les porcelets ont trouvé leurs repères dans leur nouveau bâtiment, ils ont tendance à surconsommer. Pour réguler leur appétit et réduire le risque de désordres digestifs, nous bridons la quantité d’aliment pour éviter qu’ils ne fassent des ventrées. Comme nous fabriquons notre aliment à la ferme, la proportion d’orge dans la ration peut être facilement adaptée aux besoins des animaux. Compte tenu de ses nombreuses qualités, cette céréale peut être comparée à un aliment-médicament. Si je vois que ça dérape sur le plan digestif, je n’hésite pas à monter jusqu’à 45 % d’orge dans la ration. La fabrication à la ferme offre une souplesse et une grande réactivité. Je peux lancer une fabrication immédiate d’aliment à la carte, même pour seulement 500 kg.

Didier Le Du, journaliste Paysan Breton

Sébastien Brishoual, éleveur de porcs à Trémeven (29) : « pour tendre vers l’utilisation minimale de médicaments, il faut revenir à certains fondamentaux de l’élevage ».

L’œil de l’expert :

Moins d’antibiotiques en France En 2018, le volume total des ventes d’antibiotiques pour les animaux (471 t) s’inscrit en baisse de 5,5 % par rapport à l’année 2017, selon le dernier rapport de l’Anses publié en novembre 2019. Il s’agit du tonnage le plus faible enregistré en France depuis le début du suivi en 1999 (1 311 tonnes). Une diminution de 48,2 % est observée par rapport à 2011, année de référence pour le premier plan Ecoantibio. En 2017, la consommation d’antibiotiques en France était inférieure de 36 % à la moyenne européenne (68,6 mg/kg vs 107,0 mg/kg). ANSES