Ferme de Bel’laine
Bienvenue à la ferme de Bêl’laine !
Nous sommes Johanna Colleau et Emilien Chaillou, éleveurs de brebis laitières en agriculture biologique à Brécé (35530) à 15 min de Rennes.
Johanna
J’ai 28 ans, je suis originaire de Lantic dans les Côtes d’Armor. Passionnée par le monde agricole mais non issue de ce milieu, j’ai découvert l’élevage en seconde général lors d’un stage dans une ferme en vaches laitières. Ce stage m’a donné envie de poursuivre sur une 1ère et un BAC STAV en productions agricoles. Arrivée en terminale, on devait faire un stage d’un mois à l’étranger. Mon rêve était de partir en Ecosse. Ma professeure d’anglais avait réussi à me trouver un stage au sein d’une ferme familiale en moutons. Quelques semaines plus tard, je suis donc partie découvrir ce magnifique pays, ma nouvelle famille et leur élevage de 250 brebis viandes. C’était la période des mises- bas appelée aussi « agnelage », ce fût donc ma première période d’agnelage et pas la dernière !
Après le BAC, je me suis orientée vers le milieu commercial (je ne voulais pas aller en BTS ACSE, trop général). Je suis partie sur un BTS technico-commercial en agrofournitures. Durant ces 2 ans, j’ai effectué des stages en entreprise agricole et lors d’une autre période de stage je suis repartie en Ecosse dans la même ferme familiale pour les aider lors de l’agnelage. J’ai poursuivi sur une licence responsable commerciale que je n’ai pas continuée : le contact des animaux et la technique me manquaient.
J’ai enchaîné les postes : agent de pesée, chargée d’accueil en banque, manutentionnaire, assistante commerciale etc… Tout en faisant des remplacements agricoles les week-ends. Ce fût une période très intense mais très enrichissante ! Lors d’un remplacement, j’ai travaillé 5 semaines comme assistante commerciale chez un fromager. C’est là que je suis tombée amoureuse du fromage et de l’affinage !
Un an après, je me suis inscrite au CFPPA d’Aurillac, en CS (certificat de spécialisation) en production, transformation et commercialisation des produits laitiers fermiers. Pendant cette formation j’ai été apprentie dans une ferme aveyronnaise de brebis laitières en agriculture biologique. L’objectif était de créer un fromage au lait cru de A à Z (réflexion, création, tests, aménagement de la cave d’affinages, etc..). Au bout de 6 mois, les premiers fromages sont sortis de la cave !
Ça a été une vraie réussite !
Après cette belle aventure fromagère, je suis retournée en Bretagne et j’ai effectué un remplacement dans une exploitation proche de chez nous. Je me suis installée avec Emilien le 1er janvier 2018. Je lui laisse la parole ?»
Emilien
Je suis originaire d’Acigné (35). Mes parents ne sont pas agriculteurs mais nous avons toujours été attirés par le milieu agricole. D’ailleurs un de mes frères est installé en tant que paysan boulanger et mon autre frère travaille au sein d’une CUMA.
Au niveau de ma scolarité, je n’arrivais pas trouver ma voie en filière général, c’est pour cela que j’ai suivi les pas de mon frère, parti en MFR (Maison Familiale Rurale) faire ses études. J’ai découvert l’élevage de brebis laitières lors de mes premiers stages dans une ferme proche de chez moi, ferme qu’on reprendra quelques années plus tard avec Johanna. J’ai continué mes études en effectuant un BEPA productions animales puis un BAC PRO CGEA en alternance. Pendant le BEPA, j’ai senti que le système conventionnel ne m’attirait pas. J’ai poursuivi avec un BTS ACSE en apprentissage dans la même ferme en brebis laitières.
Après le BTS, j’ai poursuivi un CS (Certificat de Spécialisation) production, transformation et commercialisation en production caprine à Châteauroux. Revenu en Bretagne, je suis devenu salarié dans la ferme de brebis laitières voisine et j’effectuais aussi d’autres missions dans des ETA, Cuma et groupement d’employeurs.
La reprise de la ferme s’est concrétisée : le feeling passait bien, le projet avançait.
Souhaitant acquérir plus de connaissances en brebis laitières, je suis parti me former dans le berceau de la race Lacaune, dans l’Aveyron en effectuant un CS en apprentissage qui a duré 8 mois. C’est à ce moment-là que j’ai vraiment compris comment ça marchait.
J’ai trouvé mon maître d’apprentissage un peu par hasard. Celui- ci manquait de main d’œuvre dans son exploitation de brebis laitières et le feeling passant très bien, je me suis donc formé à ses côtés pendant la durée du CS. C’est un éleveur passionné par son métier et dont le système m’a inspiré pour ici. Il m’a aussi inculqué qu’il ne fallait pas aller contre l’animal mais prendre le temps à l’observer et à l’accompagner… J’y reviendrai dans la semaine.
Après la formation, je suis revenu en Ille et Vilaine pour travailler dans la ferme qu’on allait reprendre avec Johanna et commencer à réaliser les démarches pour l’installation.
Présentation de la ferme :
Notre troupeau compte 260 brebis laitières, 25 béliers et 90 agnelles de renouvellement de race ‘’Lacaune’’.
Nous sommes en agriculture biologique, ce qui veut dire qu’on n’utilise pas de produit de synthèse et nos animaux ont une période à l’extérieur très importante. Nous travaillons dans une bergerie d’environ 1500 m² au sol. Celle- ci est isolée pour que les brebis et leurs agneaux n’aient pas trop chaud durant l’été car c’est la période des naissances. La bergerie est aussi équipée de rideaux qui laissent circuler l’air et d’un dôme lumineux au-dessus de la table d’affouragement.
Nous avons 70 ha de terres : 10 ha de céréales et le reste en herbe. On achète 18 ha d’herbe sur pied à l’extérieur.
Notre objectif : être le plus autonome possible.
Bonne semaine en notre compagnie !
Nous sommes en système désaisonné, c’est-à-dire que la période de reproduction a lieu au moment où les brebis devraient agneler (mettre bas). Pourquoi faire cela ? Nous sommes partis sur ce système pour répondre à la demande de la laiterie qui souhaitait avoir du lait d’automne afin de vous proposer des produits laitiers toute l’année. C’est un petit challenge pour nous de procéder de cette façon !
Nous avons aussi fait ce choix pour nous libérer du temps à partir du mois de Mai jusqu’à fin Juin pour le travail à faire dans les champs et pour partir quelques jours en vacances. Pour l’instant, on n’y arrive pas trop ?
Nous allons vous présenter les choses dans l’ordre chronologique. Chez nous, les agnelages ont lieu de juillet à septembre en bergerie. Les agnelles qu’on garde pour le renouvellement restent 40 jours avec leurs mères avant le sevrage. Les autres, les agnelets, sont vendus après 3-4 semaines. Lorsque la brebis met bas, on vérifie que tout le monde va bien (agneau qui a bu, désinfection du nombril, observation de la brebis etc. …).
1 jour après la naissance, nous identifions les agneaux (pose des boucles, dont l’électronique ; obligatoire pour la traçabilité, numérotation des agneaux, inscription de la naissance dans le carnet d’agnelage pour le suivi.) Généralement, ¾ des brebis mettent bas en 3 semaines et le reste un peu plus tard. Nous commençons donc à livrer du lait à la laiterie à partir du mois d’Août.
La brebis laitière à ses phases. Quand elle met bas, elle est très maternelle, et ne pense qu’à ses petits. Lorsque ceux- ci sont vendus ou sevrés, elle met quelques jours à inverser la tendance et ne pense qu’à manger. La période de lactation commence. Durant ce début de celle-ci, si quelque chose déraille (alimentation, écarts de température, stress etc. …), la brebis ne produit pas de lait ou commence à se tarir. Il faudra donc attendre un an pour reprendre le rythme et recommencer une lactation.
C’est très technique et très différents des autres productions laitières mais tellement passionnant !
Une brebis produit entre 2 et 3.5 litres de lait par jour pendant 5 mois puis baisse progressivement pendant 4 mois. La traite est très rapide (une heure le matin et ¾ h le soir). Nous avons une salle de traite 2 x 24, soit 24 brebis de chaque côté et tout est automatisé. De septembre à décembre, c’est une période centrée sur la production de lait. Rappelez-vous, c’est le moment où notre laiterie souhaite avoir du lait.
A cette période les brebis sont traites deux fois par jour, à horaires et intervalles fixes. L’alimentation est riche en protéines et à volonté pour répondre aux besoins de lactation des brebis. 80 % de l’alimentation vient de l’herbe du pâturage et de colza fourrager de nos dérobés.
Le menu est varié pour suivre au mieux leurs besoins. Quelque part, elle fait son repas toute seule et à la carte : par exemple, le colza fourrager est assez feuillu, elle ira donc chercher quelque chose de plus sec. Toutes les semaines, la ration change suivant la météo, leurs comportements, la qualité de l’herbe, leur laine et même leurs excréments !
En cas de coup de fatigue, nous utilisons des produits naturels : cures de vinaigre de cidre, huile de foie de morue, chlorure de magnésium, huiles essentielles … Comme on dit ‘’il vaut mieux prévenir que guérir !’’
L’observation du troupeau est essentielle !
Début janvier : on passe en monotraite soit à une seule traite. On les sollicite moins en lait, les brebis recommencent à prendre du poids. Pour encourager la prise de poids et préparer la prochaine période de reproduction, on les tond vers fin janvier. Ayant plus froid, elles mangent davantage pour se réchauffer. On leur donne aussi des vitamines, des oligoéléments et des céréales.
Les béliers sont également tondus au même moment, tout le monde doit être beau avant la période de lutte ? Tout début mars, on met ensemble béliers et brebis : on appelle cette période ‘’ la lutte’’. Nous avons beaucoup de béliers (1 pour 10/15 brebis alors qu’en général c’est plutôt 1 pour 20/30 brebis). Pour les jeunes agnelles, nous avons nos béliers de race ‘’Lacaune ‘’ mais aussi des béliers de race ‘’Charmoise’’. Bien qu’ils aient des têtes de crapauds ou de cochons (on les aime bien quand même, surtout Emilien !), leurs os plus fins permettent des mises-bas plus faciles et les agneaux sont très vifs.
On commence à faire sortir les brebis en février. En mars, elles sont toutes dehors à profiter de l’herbe. On a un système de pâturage tournant. Elles ont un espace d’herbe qu’on leur délimite chaque jour (appelé paddock) qu’elles doivent manger. Elles arrêtent de faire du lait vers mi-avril. On les rentre à la bergerie pendant 10-15 jours, on espace les traites et on modifie la ration pour les tarir (pas d’accès à l’herbe durant cette période sinon elles continuent à faire du lait).
De fin avril jusqu’à début juillet, c’est retour dehors pour les mises-bas. Lors de cette période, les brebis pâturent jour et nuit pour préparer l’agnelage. Pour l’instant, on a beaucoup de clôtures mais on aimerait revenir aux haies et aux protections naturelles. D’ailleurs avec l’association de Breizh bocage, nous avons mis en place un programme de plantation de haies dans nos parcelles. Il n’y a plus qu’à attendre que ça pousse ! Dans le même temps, on stocke de l’herbe pour passer l’hiver. Quand il n’y a plus personne dans le bâtiment, on nettoie.
On a commencé la vente directe de viande en 2018 avec simplement 7 agneaux vendus par le bouche à oreille. On a continué l’année suivante avec une vingtaine. L’année dernière, 25 agneaux ont été réservés en 15 jours ! On vend des caissettes d’agneaux, entre 7 et 10 kilos (1/2 agneau). Nos agneaux sont nourris exclusivement à l’herbe et au lait. Nous vendons aussi des saucisses, merguez et steaks hachés 3 à 4 fois par an selon la demande. Tout est conditionné sous vide et prêts à être consommés. On travaille avec TVR et ça se passe très bien. On développe cette partie viande en attendant de pouvoir financer la fromagerie.
Ce projet de transformation laitière, on l’a depuis le départ. Aujourd’hui, nous produisons du lait pour la laiterie et une petite partie est vendu à un artisan fromager. Si vous avez suivi attentivement la semaine, vous aurez compris que les brebis ne donnent pas de lait pendant 4 mois. C’est une période où nous n’avons pas de rentrée d’argent, mais les factures, elles continuent d’arriver. La vente est donc essentielle pour continuer de vivre !
Nous espérons que vous connaissez mieux notre élevage désormais ! Vous pourrez continuer de suivre nos aventures sur facebook.
À bientôt !
Johanna et Emilien