Richard Le Dreff

Richard Le Dreff
Pisciculteur
Blavet

Bonjour, merci à Guillaume d’avoir témoigné la semaine dernière. Bienvenue à la pisciculture de Kerauter à Sainte Tréphine (22). Je m’appelle Richard Le Dreff, j’ai 53 ans et je suis le gérant de cette pisciculture familiale, fondée en 1974 par mon père et mon grand-père. La pisciculture est située sur le Blavet, qui prend sa source vers Bourbriac (à côté de Guingamp) et va se jeter à Hennebont (près de Lorient).

J’ai passé un BEP aquacole à Guérande qui était la seule école en France à l’époque. J’ai commencé ici en 1985 en tant que salarié. Devenu gérant, j’y travaille avec mon salarié Stéphane et quelques stagiaires et BTS en alternance.

Nous élevons des truites arc en ciel. Nous en produisons environ 250 tonnes par an, qui sont ensuite transformées dans l’usine de notre coopérative « Les Aquaculteurs Bretons » à Plouigneau. Vous retrouverez nos produits en grande surface sous la marque « Bretagne Truite » avec des barquettes, de pavés et en truites fumées.

Bonne semaine en ma compagnie !

Les truites passent entre 2 ans et demi à 3 ans sur l’élevage. J’achète mes truitelles à deux sites d’alevinage de la coopérative aux alentours de 30g. Quand elles quitteront l’élevage, elles feront environ 3 kilos. Au fur et à mesure de leur croissance (150g, 300g, 1 kilo et 2.5 kilos), elles changeront de bassin pour avoir des lots homogènes et c’est important pour qu’elles soient bien.

Nous leur donnons une alimentation végétale sans OGM et sans farines animales, adaptée à leur stade de croissance. Il y a énormément de recherches pour substituer les huiles de poisson et on arrive désormais à proposer des alternatives exclusivement végétales.

N’empêche, depuis 20 ans, nous avons largement amélioré l’alimentation de nos truites. Les rejets ont été drastiquement réduits. Aujourd’hui, chez moi pour faire des truites de 3 kg il faut 1.3  kilo d’aliment pour faire 1 kilo de truite. Les matières premières ont flambé, on ne peut pas se permettre de gaspiller.

Un point très important à savoir, c’est que la totalité de l’eau passant dans la pisciculture en ressort en totalité après avoir été décantée.

1/3 des bassins de ma pisciculture servent à la décantation de l’eau. 1 fois par an j’épands les boues sur des terres agricoles comme fertilisant. Dans ces bassins, je teste l’aquaponie ! Je fais pousser des salades et bientôt des plantes aromatiques (persil, ciboulette…). Pas besoin de traiter ou d’arroser, les plantes pompent les matières organiques des déchets des poissons ce qui épure l’eau. Ceci est possible uniquement quand on a de la place comme chez moi.

J’espère pouvoir refaire circuler cette eau épurée en circuit semi-fermé une deuxième fois dans les bassins avant qu’elle ne reparte dans la rivière après décantation.

Je pense qu’il y a un potentiel avec ces cultures aquaponiques. J’ai engagé avec le directeur technique une réflexion sur ce dossier.

La truite est un poisson très exigeant en oxygène et très sensible à la qualité de l’eau. Pour l’anecdote, on introduit des truites à la sortie des grosses stations d’épuration pour s’assurer que les eaux sont propres. Si on arrive à pêcher des truites dans nos rivières, c’est qu’elles sont dans un bon état.

L’eau est analysée à l’entrée et à la sortie de la pisciculture tous les mois par un laboratoire agréé. Cela demande une vigilance permanente et un soin tout particulier apporté à l’hygiène du site et des bassins.

Un système de pompage assure l’oxygénation des bassins. Des sondes à oxygène reliées à des alarmes nous alertent en cas de besoin.

La truite est un animal à sang froid. C’est elle qui décide, pas nous. En fonction des saisons, elle joue le jeu ou non. Il faut idéalement une eau entre 8 et 15°. En hiver s’il fait trop froid, elle hiberne. En été, si la température est trop élevée, elle ne s’alimente pas.

À l’arrivée des truitelles, nous recevons un bon de livraison avec des informations de traçabilité qui les suivront toutes leurs vies. Ces infos sont rentrées dans un logiciel. Quotidiennement, nous indiquons l’alimentation qu’elles ont reçu, la mortalité, les tris effectués….

Nous allons ensuite les vacciner une par une afin qu’elles ne soient pas malades

Le jour de leur départ, on remplit un bon de livraison qui récapitule toute la carrière du poisson dans l’élevage. À l’usine de transformation, cette traçabilité sera accessible si besoin.

Toute cette traçabilité est contrôlée par Bureau Véritas car nous sommes référencés « Charte Aquaculture de nos régions » cahier des charges de l’interprofession CIPA

Un mot sur notre coopérative : Les Aquaculteurs Bretons. Nous sommes une quinzaine d’adhérents coopérateurs et nous produisons 5000T sur les 40000 produites sur toute la France. Nous mutualisons une grande partie de nos activités (alevinage, aliments, transformation, commercialisation…), mais nous restons bien propriétaires de nos piscicultures.

La coopérative compte une quarantaine de salariés. Les produits sont commercialisés sous la marque Bretagne Truite et William&James . Nous nous sommes adaptés à la demande des consommateurs. En ce moment, il ne veut pas d’arêtes. Nous commercialisons donc beaucoup de pavés et surtout des très grandes truites pour faire de la truite fumées (+50%)

Nous avons beaucoup travaillé sur la qualité de nos produits. L’année dernière, nous avons été récompensés d’une médaille d’or au Concours Général Agricole pour notre truite fumée de Bretagne. C’est un gage de qualité ! Nous sommes fiers de voir que notre travail est reconnu et que la demande est forte sur nos produits.

J’ai déjà ouvert les portes de l’élevage au grand public. Les gens qui sont venus sur la pisciculture se posaient beaucoup de questions. C’est un métier qui n’est pas très connu et ça a été l’occasion d’enlever beaucoup de préjugés. C’est un métier passionnant qui demande beaucoup de rigueur.

On a été fier de présenter notre métier et je le referai à la prochaine occasion.

Merci de m’avoir suivi cette semaine ! Lundi prochain, vous retrouverez Anaïs et ses cochons !